Que Dieu sauve le Mali (suite)

Les pêcheurs en eau trouble ont repris du service. La rengaine "entrons et sortons par la même porte" nous est resservie par des entremetteurs-médiateurs-coxeurs de service. Voilà que tout ce beau monde veut contribuer, chacun pour ses raisons propres, à la tenue des "concertations nationales" afin que les maliennes et maliens se parlent et se mettent d'accord pour une sortie honorable de crise.

Je suis un partisan passionné de la recherche de consensus pour la prise de décision publique. J'ai, à maintes, eu l'occasion de dire et d'écrire que, dans nos modalités de gestion publique, nous devons faire de la recherche du consensus la règle et du vote l'exception.

Je clarifie en disant que je parle bien de la recherche du consensus, comme modalité de prise de décision et non de l'unanimisme qui nous a été servi pendant dix ans par le système ATT. Je vous promets de revenir amplement sur ce sujet une prochaine fois.

Pour revenir aux fameuses "concertations nationales" auxquelles s'accroche le Premier Ministre et qui sont présentées à l'opinion comme le seul moyen qui nous permet aujourd'hui de gérer de façon consensuelle la crise et la sortie de crise. Dont acte ! Mais quelles sont conditions pour y arriver ?

Le respect mutuel entre les acteurs est nécessaire, même si les convictions et les parcours sont différents, pour toutes concertations fructueuses. La junte militaire qui a perpétré le putsch, leurs acolytes et ceux qui voulaient en profiter pour se faire ou se refaire une santé politique ont fait irruption sur l'espace politique en vouant aux gémonies tous ceux qui ont géré le pays depuis 20 ans.

Le mouvement démocratique, la 3ème République et les politiques sont les seuls responsables du chaos qui justifie le coup d'Etat du 21 mars 2012. Pour les uns, c'est une revanche à prendre, pour les autres, c'est la recherche d'un nouveau départ en cassant les démocrates du 26 mars 1991. Bref, il faut jeter le bébé avec l'eau du bain. Les bons maliens doivent éliminer les mauvais maliens.

Après 8 mois perdus à s'occuper de tout sauf de la crise que vit le pays, au jour d'aujourd'hui quel intérêt à se concerter sur d'autres sujets que la feuille de route du gouvernement pour le rétablissement de la souveraineté de l'Etat sur l'ensemble du territoire et l'organisation d'élections justes avec des résultats acceptées par tous. Puisque nous sommes dans la Constitution, gérons avec les institutions républicaines qui existent en les responsabilisant pleinement et chacune dans son son rôle.

Peut-on aller à des concertations qui exclues des pans entiers des représentants légitimes et dûment mandatés (quoi qu'on en pense) du peuple malien. À défaut de commencer dans les régions, les concertations pour être nationale et crédible doivent regrouper des représentants de toute la diversité sociale, professionnelle et territoriale de notre pays.

À défaut de réunir ces conditions préalables, toute parodie de concertations nationales n'a d'autre objectif que tenter de donner un semblant de légitimité à un Premier Ministre qui en manque et qui n'a aucune volonté de sortir notre pays de la crise. La preuve en est que d'avril 2012 à nos jours, il n'a pris aucune initiative et n'a fait que reprendre à son compte les initiatives de la CEDEAO, après les avoir vigoureusement rejetées dans un premier temps.

Son agenda n'est pas le Mali, mais lui même. Il est donc disqualifié pour organiser les concertations pour la sortir de crise.

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