Entre rêves, réalités et résilience. Quelles perspectives pour le Mali, 64 ans après son indépendance ?

  Le 22 septembre 1960, j’avais onze (11) ans.  Comme tous les jeunes nouveaux maliens de cette époque, j’avais la tête pleine de rêves. Rêves d’un Mali libre, plus uni et prospère. Rêves d’une République du Mali, où tous les citoyens seront égaux en droits et devoirs. Rêves d’un Mali dans lequel chacune des identités est reconnue et respectée. Rêves d’un Mali dans lequel toutes les diversités communautaires et territoriales sont équitablement représentées dans les institutions et administrations publiques. 

Cependant, plus de six (6) décennies plus tard, la réalité est que le vaste territoire hérité de la colonisation est au bord de l’émiettement. La nation plurielle, héritière du vivre ensemble respectueux de l’identité de chacun « nous sommes unis dans le respect de nos différences » est au bord de la division. De nos jours au Mali, si tu es différent et que tu ne penses pas comme moi, tu deviens un « mauvais malien » un ennemi à abattre. De nos jours au Mali, le dialogue (sigui ka fo) et le compromis (fo ka ben) deviennent impossibles.

Nous en sommes à cette situation, parce qu’à l’accession à l’indépendance, l’Etat colonial et ses doctrines ont été reconduits presque intacts. Les élites s’accrochent encore à la gestion centralisée des affaires publiques, qui exclue et déresponsabilise la majorité des « citoyens », et à l’uniformisation des territoires et des communautés, pensant ainsi mieux préserver l’unité du pays. Ce que j’appelle le « pays légal » tient encore parce que le « pays réel » résiste, malgré sa marginalisation dans la gestion des affaires publiques. Mais cette résistance ne deviendra résilience que si elle ouvre sur une dynamique de changement profond du cadre et des modalités de la gestion des affaires publiques

Ce changement en profondeur doit concerner d’abord l’Etat qui gouverne la nation. L’Etat malien doit être à l’image de la Nation malienne, c’est dire unie dans le respect des diversités humaines et territoriales. Le changement doit ensuite concerner le modèle de démocratie qui est controversé parce qu’il est exclusif. Le modèle de confrontation (majorité/opposition) et de celui du « gagnant/perdant » doit céder la place à un modèle consensuel et de partage. C’est au prix de ces changements de fond que nous serons capables d'asseoir les bases d’un Mali stable, en paix et de prospérité parce qu’en capacité de mobiliser tout le potentiel des communautés et des territoires.  

Bamako, le 25 septembre 2024

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